Le Dauphiné

Carte du Royaume d’Arelat

Antiquité classique et Moyen Âgedit

Domination romaine et début du Moyen Âgedit

La région du futur Dauphiné était habitée par les Allobroges et d’autres tribus gauloises dans les temps anciens. La région a été conquise par les Romains avant la conquête de la Gaule par Jules César. Vienne est devenue une colonie romaine et l’une des villes les plus importantes de la Gaule.

Après la fin de l’Empire romain d’Occident, la région a souffert des invasions des tribus wisigoths et alanes. Les Bourguignons s’installent à Vienne. Après le traité de Verdun en 843, la région fait partie du royaume de Lotharingie. Cependant, le roi de France Charles le Chauve a rapidement revendiqué l’autorité sur ce territoire.

Le gouverneur de Vienne, Boson de Provence, se proclame roi de Bourgogne et la région fait partie du Royaume d’Arelat, qui reste indépendant jusqu’en 1032, date à laquelle elle fait partie du Saint-Empire romain germanique.

À cette époque, le développement de la société féodale et la faiblesse de la domination de l’empereur ont permis la création de plusieurs petits États ecclésiastiques ou sécularistes (la région du Viennois, par exemple, était sous la domination de l’archevêque de Vienne). Au milieu de ce chaos, les Comtes d’Albon ont réussi à unir ces différents territoires sous leur domination.

Fief impérial (1040-1349) Modifier

Article principal: Liste des Comtes d’Albon et des Dauphins de Viennois
Armoiries du Dauphiné avant 1349

Au milieu du chaos de la domination féodale, les Comtes d’Albon ont commencé à s’élever au-dessus des autres seigneurs féodaux et à acquérir une domination sur la région. Leur histoire commence avec Guigues Ier le Vieux (mort en 1070), seigneur d’Annonay et du Champsaur. Durant son règne, il gagne d’importants territoires pour sa province : une partie du Viennois, du Grésivaudan et de l’Oisans. De plus, l’empereur lui a donné la région de Briançon. Les territoires réunis sous son règne personnel devinrent une principauté de montagne souveraine au sein du Saint-Empire romain germanique. Le comte prit une décision importante en choisissant la petite ville de Grenoble comme capitale de son État au lieu de la prestigieuse ville de Vienne, siège établi de longue date d’un puissant évêque. Ce choix lui a permis d’affirmer son autorité sur tous ses territoires.

Au XIIe siècle, le souverain local, le comte Guigues IV d’Albon (v. 1095-1142) portait un dauphin sur ses armoiries et était surnommé le Dauphin. Ses descendants changèrent leur titre de Comte d’Albon en Dauphin de Viennois. L’État prit le nom de Dauphiné.

Cependant, le Dauphiné n’avait pas, à ce stade, ses frontières modernes. La région de Vienne et de Valence étaient indépendantes et même à Grenoble, la capitale, l’autorité était partagée avec l’évêque. De plus, les villes de Voiron et de la Côte-Saint-André faisaient partie du comté de Savoie, tandis que les Dauphins avaient le Faucigny et des territoires en Italie. Cet enchevêtrement entre le Dauphiné et la Savoie a donné lieu à plusieurs conflits. Le dernier dauphin, Humbert II de Viennois, fit la paix avec son voisin. Il a également acquis la ville de Romans. Il crée enfin le Conseil Delphinal et l’Université de Grenoble et édicte le Statut Delphinal, sorte de constitution qui protège les droits de son peuple.

Domination françaisedit

Les dettes importantes d’Humbert II et la mort de son fils et héritier conduisent à la vente de sa seigneurie au roi Philippe VI en 1349, selon les termes du traité de Romans, négocié par son protonotaire, Amblard de Beaumont. Une condition majeure était que l’héritier du trône de France soit connu sous le nom de Dauphin, ce qui était le cas de cette époque jusqu’à la Révolution française; le premier Dauphin de France était le petit-fils de Philippe, le futur Charles Quint de France. Le titre conférait également un appanage à la région. Charles Quint a passé neuf mois sur son nouveau territoire.

L’accord de Humbert stipulait en outre que le Dauphiné serait exonéré de nombreux impôts (comme la gabelle); ce statut a fait l’objet de nombreux débats parlementaires ultérieurs au niveau régional, les dirigeants locaux cherchant à défendre cette autonomie et ce privilège régionaux contre les assauts de l’État.

La noblesse du Dauphiné prit part aux batailles de Poitiers (1356) et d’Agincourt (1415). La province a également été le cadre d’événements militaires pendant la guerre. Le duc de Savoie et le Prince d’Orange, avec l’aide des autorités anglaises et bourguignonnes, projetaient d’envahir le Dauphiné, mais à la bataille d’Anthon en 1430, l’armée de la Principauté d’Orange fut vaincue par les troupes du Dauphiné, empêchant l’invasion.

Louis XI fut le seul Dauphin de France à administrer son territoire, de 1447 à 1456. C’est sous son règne de Dauphin que le Dauphiné s’est totalement intégré à la France. À cette époque, c’était un État anarchique, avec des conflits entre nobles encore courants. Louis XI interdit ces conflits et oblige les nobles à reconnaître son autorité. Le Conseil Delphinal devient le troisième Parlement de France. De plus, Louis XI unit politiquement le Dauphiné. Il obligea l’archevêque de Vienne, l’évêque de Grenoble et l’abbé de Romans à lui prêter allégeance. Il acquiert également Montélimar et la principauté d’Orange.

De plus, il développa l’économie de la province, en construisant des routes et en autorisant des marchés. Il crée finalement l’Université de Valence fondée le 26 juillet 1452, par lettres patentes. Néanmoins, il a également essayé d’instituer la gabelle sans renvoyer la question aux domaines de la province, ce qui a provoqué le mécontentement de la noblesse et du peuple de la province. En raison de son opposition à son père, Charles VII, il est contraint de quitter le Dauphiné. Le roi reprend le contrôle de la province et force les Domaines à prêter allégeance en 1457.

La suzeraineté impériale n’a pas été entièrement oubliée au XVe siècle. L’empereur Sigismond négocie avec le roi Henri V d’Angleterre pour donner le Dauphiné à un prince anglais. Les Dauphinois n’ont pas non plus oublié leur autonomie. La Pragmatique Sanction de Bourges (1438), qui expose le gallicanisme, et le Concordat de Bologne (1516), qui rectifie la France avec la Papauté, sont tous deux promulgués pour la France et le Dauphiné de manière distincte. L’Ordonnance de Villers-Cotterêts (1539), en revanche, qui faisait du français la langue officielle de la France, puisqu’il n’était pas délivré par le roi en tant que dauphin n’était pas reconnue dans le Dauphiné. Une seconde ordonnance fut promulguée à Abbeville le 9 avril 1540 par le roi en tant que dauphin et ce que le parlement dauphinois accepta.

Histoire du début de la modernitémodifier

Temps des troublesmodifier

Dauphiné circa 1638

Jour des Tuiles, 1890 tableau d’Alexandre Debelle, (Musée de la Révolution française).

Pendant les guerres d’Italie (1494-1559), les troupes françaises sont cantonnées en Dauphiné. Charles VIII, Louis XII et François Ier séjournèrent souvent à Grenoble, mais les habitants de la province subirent les exactions des soldats. De plus, la noblesse de la région a pris part aux différentes batailles (Marignano, Pavie) et a acquis un immense prestige. Le plus connu de ses membres était Pierre Terrail de Bayard, « le chevalier sans peur et sans reproche ».

La province a souffert des guerres de religion françaises (1562-98) entre catholiques et protestants à la fin du XVIe siècle. Le Dauphiné était un centre du protestantisme en France, dans des villes comme Gap, Die et La Mure. François de Beaumont, le chef huguenot, est devenu célèbre pour sa cruauté et ses destructions.

L’exécution cruelle de Charles du Puy-Montbrun, chef des Protestants, par le roi de France, a entraîné plus de violence et de luttes entre les deux parties.

En 1575, Lesdiguières devient le nouveau chef des protestants et obtient plusieurs territoires dans la province. Après l’accession d’Henri IV au trône de France, Lesdiguières s’allie avec le gouverneur et le lieutenant général du Dauphiné. Cependant, cette alliance n’a pas mis fin aux conflits. En effet, un mouvement catholique, la Ligue, qui prend Grenoble en 1590, refuse de faire la paix. Après des mois d’assauts, Lesdiguières bat la Ligue et reprend Grenoble. Il est devenu le chef de toute la province.

Administration de Lesdiguières (1591-1626) Edit

Les conflits étaient terminés, mais le Dauphiné était détruit et ses habitants épuisés. La promulgation de l’Édit de Nantes (1598) rétablit certains droits civils aux Huguenots et ramène la paix pour une courte période, mais les guerres reprennent peu après.

Lesdiguières vainquit plusieurs fois l’armée de Savoie et aida à la reconstruction de la région. Sa construction la plus célèbre est le Palais de Vizille, construit pour son usage personnel.

La dernière réunion des Domaines du Dauphiné a eu lieu en 1628. Il symbolise la fin de la liberté de la province. À partir de ce moment, les décisions importantes ont été prises par les représentants du roi. Il montre les progrès de l’absolutisme.

De Louis XIV à la Révolution françaiseModifier

La révocation de l’Édit de Nantes par Louis XIV en 1685 provoque le départ de 20 000 protestants du Dauphiné, affaiblissant l’économie de la province. Certaines vallées ont perdu la moitié de leurs habitants.

En 1692, pendant la guerre de Neuf Ans, le duc de Savoie envahit le Dauphiné. Gap et Embrun ont été gravement endommagés. Mais les armées savoyardes furent vaincues par Philis de la Charce.

En 1713, le traité d’Utrecht modifie les frontières du Dauphiné. La province gagne la ville de Barcelonette mais perd la majeure partie du Briançonnais.

Le XVIIIe siècle est une période de prospérité économique pour la région, avec le développement de l’industrie (fabrication de gants à Grenoble, filatures de soie dans la vallée du Rhône). D’importants salons ont également eu lieu à Grenoble ou à Beaucroissant.

En 1787, la province fut l’une des premières à exiger la réunion des États généraux de France. Le tournant a eu lieu en 1788 avec le Jour des Tuiles. Le roi ordonne l’expulsion des parlementaires de Grenoble. En partie parce que l’économie de la ville dépendait de son Parlement, la population locale attaqua les troupes royales en jetant des tuiles des toits pour empêcher l’expulsion des magistrats. Cet événement permit la séance de l’Assemblée de Vizille, qui fut l’instigatrice de la réunion des anciens États généraux, amorçant ainsi la Révolution.

Histoire modernedit

Période révolutionnaire et Empiredit

Pendant la Révolution française, le Dauphiné était très représenté à Paris par deux illustres notables grenoblois, Jean Joseph Mounier et Antoine Barnave.

En 1790, le Dauphiné était divisé en trois départements, l’actuelle Isère, la Drôme et les Hautes-Alpes.

Statue de Napoléon à Laffrey

L’approbation de l’établissement de l’Empire fut claire et écrasante dans le Dauphiné. En Isère, les résultats ont montré 82 084 oui et seulement 12 non.

En 1813, le Dauphiné était sous la menace de l’armée autrichienne qui avait envahi la Suisse et la Savoie. Après avoir résisté au fort Barraux, les troupes françaises se replient sur Grenoble. La ville, bien défendue, contenait les attaques autrichiennes et l’armée française vainquit les Autrichiens, les forçant à se retirer à Genève. Mais l’invasion de la France en 1814 entraîne la capitulation des troupes en Dauphiné.

Lors de son retour de l’île d’Elbe en 1815, l’Empereur est accueilli par les habitants de la région. A Laffrey, il rencontre le 5e Régiment d’Infanterie royaliste de Louis XVIII. Napoléon s’avance vers les soldats et dit ces mots célèbres :  » S’il y a parmi vous un soldat qui veut tuer son Empereur, me voici. » Tous les hommes se sont joints à sa cause. Napoléon est alors acclamé à Grenoble. Après la défaite de Waterloo, la région a souffert d’une nouvelle invasion des troupes autrichiennes et sardes.

19ème siècleModifier

Ce siècle correspond à un développement industriel important du Dauphiné, en particulier dans la région de Grenoble (la ganterie atteint son Âge d’Or à cette époque) et dans la vallée du Rhône (filatures de soie). L’industrie de la chaussure s’est également développée à Romans.

Sous le Second Empire, le Dauphiné vit la construction de son réseau ferroviaire (les premiers trains arrivèrent à Valence en 1854 et à Grenoble en 1858). La conduite de nouvelles routes dans les chaînes du Vercors et de la Chartreuse a permis le début du tourisme dans la province. De plus, plusieurs personnalités telles que la Reine Victoria sont venues dans la région avec le succès des stations thermales telles qu’Uriage-les-Bains.

En 1869, Aristide Berges joue un rôle majeur dans l’industrialisation de la production d’hydroélectricité. Avec le développement de ses papeteries, le développement industriel s’étend à la région montagneuse du Dauphiné.

20e siècleModifier

Porte de l’Exposition Internationale de l’Hydroélectricité et du Tourisme

Pendant la Belle Époque, la région a bénéficié de transformations majeures grâce à sa croissance économique. La vallée de la Romanche est devenue l’une des vallées industrielles les plus importantes du pays. La Première Guerre mondiale a accéléré cette tendance. En effet, afin de soutenir les efforts de guerre, de nouvelles industries hydroélectriques se sont installées à côté des différentes rivières de la région. Plusieurs autres entreprises se sont lancées dans l’industrie de l’armement. Des entreprises chimiques se sont également installées dans la région de Grenoble et près de Roussillon dans la vallée du Rhône.

L’industrie textile du Dauphiné a également bénéficié de la guerre. L’occupation du nord de la France a entraîné l’installation de nombreuses entreprises textiles dans la région. Vienne, par exemple, produit un cinquième de la production nationale de draps pour l’armée en 1915.

Plusieurs soldats alpins, les Chasseurs Alpins, ont été tués à la guerre. Ils étaient surnommés les « Diables bleus » pour leur courage sur le terrain.

Le développement économique de la région a été souligné par l’organisation à Grenoble de l’Exposition internationale de la Houille Blanche en 1925, visitée par des milliers de personnes.

L’entre-deux-guerres se caractérise également par le début des sports d’hiver en Dauphiné. La station de ski de l’Alpe d’Huez a été construite en 1936, et Jean Pomagalski y a créé le premier téléski à plateau au monde.

Drapeau de la République Libre du Vercors proclamé en 1944

Pendant la Seconde Guerre mondiale, lors de l’invasion italienne de la France, les Chasseurs Alpins contenaient les troupes italiennes, empêchant une invasion de la région. Mais les victoires allemandes dans le nord de la France menacent rapidement les troupes du Dauphiné. Les nazis furent arrêtés près de Grenoble, à Voreppe. Les forces françaises ont résisté jusqu’à l’armistice. Le Dauphiné fait alors partie de l’État français, avant d’être occupé par les Italiens de 1942 à 1943, lorsque les Allemands occupent le sud de la France.

En raison de son caractère montagneux, le Dauphiné était le siège d’une forte activité partisane. Le plus connu était le Maquis du Vercors. En 1944, ses membres ont souffert des attaques allemandes. Le village martyr de Vassieux ainsi que Grenoble ont été faits Compagnon de la Libération par le général Charles de Gaulle, pour souligner leurs actions contre les nazis.

En 1947, une course cycliste est créée par un journal Le Dauphiné libéré pour favoriser sa diffusion. Après la Seconde Guerre mondiale, alors que le cyclisme se remet d’une interruption universelle de cinq ou six ans, le journal grenoblois décide de créer et d’organiser une course par étapes cycliste couvrant le Dauphiné. Cela a créé le Critérium du Dauphiné avant 2010 connu sous le nom de Critérium du Dauphiné Libéré, est une course cycliste sur route annuelle dans la région du Dauphiné. La course se déroule sur huit jours durant la première quinzaine de juin. Il fait partie du calendrier de l’UCI World Tour et compte parmi les courses les plus importantes en vue du Tour de France en juillet, avec le Tour de Suisse dans la deuxième quinzaine de juin.

En 1968, Grenoble accueille les Xes Jeux Olympiques d’hiver, permettant une transformation majeure de la ville, le développement des infrastructures (aéroport, autoroutes, etc.) et de nouvelles stations de ski (Chamrousse, Les Deux Alpes, Villard-de-Lans, etc.).

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