Le Collier

Guy de Maupassant 1884

Biographie de l’auteur

Résumé de l’intrigue

Personnages

Thèmes

Style

Contexte historique

Aperçu critique

Critique

Sources

Lectures complémentaires

La nouvelle de Guy de Maupassant « Le Collier » (« La parure « ) a été publiée pour la première fois dans le journal parisien Le Gaulois le 17 février 1884, et a ensuite été incluse dans son recueil de nouvelles de 1885 Contes de Jour et de Nuit (Contes de jour et de la nuit). Comme la plupart des courts métrages de fiction de Maupassant, ce fut un succès instantané, et c’est devenu son histoire la plus lue et la plus anthologisée. En plus de ses personnages bien arrondis, de son intrigue serrée, de sa richesse de détails et de son commentaire social vif, « The Necklace » est remarquable pour son utilisation de la fin « whip-crack » ou « O. Henry », dans laquelle une torsion de l’intrigue à la fin de l’histoire change complètement le sens de l’histoire. Bien que Maupassant ait rarement utilisé l’appareil, sa présence dans cette œuvre l’y a lié irrévocablement. Bien qu’on ne sache pas d’où Maupassant a eu l’idée de son histoire, certains liens peuvent être établis entre « Le Collier » et le roman Madame Bovary, écrit par le mentor et ami de Maupassant, Gustave Flaubert. Les deux histoires mettent en scène une jeune et belle femme dans une situation sociale qu’elle trouve déplaisante. Comme Madame Bovary, Mathilde Loisel tente d’échapper à son statut social dans la vie, mais ses agissements intrigants la condamnent finalement.

Biographie de l’auteur

Henri-René-Albert Guy de Maupassant est né le 5 août 1850 près de Tourville-sur-Arques en Normandie, France, où il a passé la majeure partie de sa jeunesse. Fils aîné de parents aisés qui se sont finalement séparés, Maupassant n’a pas été autorisé à aller à l’école avant l’âge de treize ans. Auparavant, le curé de la paroisse locale était son tuteur.

Expulsé d’un séminaire catholique, Maupassant termine sa scolarité dans un pensionnat de Rouen avant d’étudier le droit à l’Université de Paris. Ses études sont bientôt interrompues par la guerre franco-prussienne de 1870, et Maupassant devient soldat en Normandie. Après la guerre, Maupassant ne retourna pas à l’université et entra plutôt dans la fonction publique, travaillant comme commis dans les ministères de la Marine et de l’Éducation.

Démissionnant du ministère de l’Éducation en 1880, Maupassant devient écrivain à plein temps. Il commence par imiter le style de Gustave Flaubert, un éminent romancier français qui était un ami proche de la mère de Maupassant depuis des décennies. Des rumeurs infondées circulaient à l’époque selon lesquelles Flaubert était le véritable père de Maupassant; les deux parties ont toujours nié avec véhémence les allégations. Pris sous l’aile de Flaubert, Maupassant fait la connaissance de certains des auteurs les plus en vue de son temps, dont Emile Zola, Ivan Tourgueniev et Alphonse Daudet.

À la suite de la publication de sa première histoire,  » Boule de suif « , dans un recueil de récits de plusieurs auteurs en 1880, Maupassant s’impose comme un écrivain éminent de nouvelles et de romans. Au cours de la décennie suivante, il publie six romans et près de trois cents nouvelles, dont beaucoup dans les journaux parisiens Gil-Bias et Le Gaulois. Il a également écrit des pièces de théâtre, de la poésie, des essais de voyage et des articles de journaux.  » Le Collier  » ( » La parure « ) parut dans Le Gaulois le 17 février 1884 et fut inclus dans le recueil Contes du jour et de la nuit de Maupassant en 1885.

Au cours des années 1880, la santé de Maupassant déclina, en grande partie à cause de la syphilis qu’il avait contractée dans les années 1870 mais que les médecins n’avaient pas diagnostiquée. Après une tentative de suicide infructueuse le 2 janvier 1892, Maupassant est placé dans un sanatorium. Il est décédé un an et demi plus tard de complications de la maladie.

Résumé de la parcelle

« Le Collier » commence par une description de Madame Mathilde Loisel. Bien qu’elle soit  » jolie et

charmante « , elle et son mari, commis au ministère de l’Éducation, ne sont pas à l’aise financièrement. Elle a toujours rêvé d’une vie de loisirs, avec des serviteurs attentifs et une grande maison, mais son style de vie est décidément plus modeste. Honteuse de son statut social, elle ne rend plus visite à Madame Forestier, une vieille amie d’école devenue riche.

Lorsque les Loisels sont invités à un bal, Madame Loisel s’énerve, insistant sur le fait qu’elle n’a rien à porter pour un tel événement. Espérant que sa femme se sente mieux, Monsieur Loisel lui propose de lui acheter une nouvelle robe. À l’approche du bal, Madame Loisel redevient anxieuse car elle n’a pas de bijoux à porter. Son mari lui suggère d’emprunter des bijoux à Madame Forestier. Madame Loisel rend visite à son vieil ami le lendemain. Elle est accueillie et encouragée à emprunter n’importe quel bijou qu’elle désire. Elle choisit un magnifique collier de diamants.

Au bal, Madame Loisel s’amuse énormément et beaucoup d’hommes la remarquent. Elle danse jusqu’à 4h00 du matin, puis elle et son mari rentrent chez eux dans un taxi décrépit. Ce n’est qu’à leur retour dans leur humble maison que Madame Loisel se rend compte qu’elle a perdu le collier de diamants. Son mari passe plusieurs heures à retracer leurs pas mais ne trouve rien. Ils décident de remplacer le collier sans le dire à Madame Forestier, et ils s’endettent lourdement.

Des années de labeur et de travail exténuant dans le but de rembourser leur dette vieillissent Madame Loisel, elle a donc l’air bien plus âgée que ses années. Cependant, après dix longues années de pauvreté, ils remboursent finalement la totalité de leur dette. Pourtant, Madame Loisel se souvient avec nostalgie et tendresse du soir du bal. Un jour, peu de temps après, Madame Loisel croise Madame Forestier, qui a encore l’air jeune et belle. Madame Loisel raconte toute l’histoire à son amie. Madame Forestier, qui n’avait pas réalisé que son collier avait été remplacé par un autre, révèle que l’original, fait d’imitation de diamants, n’avait pas de valeur.

Caractères

Madame Jeanne Forestier

Madame Forestier est une amie d’école de Mathilde Loisel, et elle lui prête le collier que Madame Loisel porte au bal. La richesse de Madame Forestier a intimidé Madame Loisel, l’empêchant de rester en contact avec son vieil ami. Lors de la visite de Madame Loisel, Madame Forestier est toujours aussi sympathique, offrant généreusement de prêter à son amie un morceau de ses bijoux pour le bal. Lorsque le collier de diamants est rendu avec plus d’une semaine de retard, Madame Forestier est froide et réprobatrice. Elle ne sait pas que le collier emprunté a été perdu et que les Loisels se sont engagés à des années de dettes pour acheter un remplacement coûteux. Des années plus tard, les deux se rencontrent dans la rue. Madame Loisel a vieilli prématurément par le labeur et les difficultés, tandis que Madame Forestier est  » encore jeune, toujours belle, toujours attirante. »Elle ne reconnaît pas son vieil ami lorsqu’ils se rencontrent et est « profondément émue » lorsqu’elle apprend que les Loisels avaient passé la dernière décennie endettée pour remplacer son collier.

Madame Mathilde Loisel

C’est le désir de Madame Loisel de faire partie de la classe supérieure qui met en mouvement les événements de l’histoire. C’est une belle femme qui se sent « née pour chaque délicatesse et luxe. »Sa conviction qu’elle est destinée à de meilleures choses que la corvée de la classe moyenne constitue le noyau de sa personnalité. Elle croit que des choses superficielles — une robe de bal, de meilleurs meubles, une grande maison – la rendront heureuse, et une invitation à un bal la rend misérable car elle lui rappelle sa garde-robe démunie et son manque de bijoux. Après avoir obtenu ces attributs du luxe, elle a le temps de sa vie au bal, le temps d’une soirée à vivre le style de vie auquel elle se croit autorisée. Après avoir perdu un collier emprunté, elle n’est pas en mesure d’admettre l’erreur à l’ami qui l’a prêté. Alors qu’elle passe de nombreuses années dans la pauvreté, peinant à rembourser la dette de remplacement du collier, Madame Loisel perd prématurément sa beauté physique.

Monsieur Loisel

La complaisance et le contentement de Monsieur Loisel avec sa situation sociale contrastent nettement avec le désir de sa femme de vivre parmi l’élite sociale. Alors que Madame Loisel rêve de magnifiques repas à plusieurs plats, son mari se contente de plats simples :  » Bouillon de scotch! Quoi de mieux ? »Il est cependant attentif aux désirs de sa femme, se procurant des billets pour un bal afin qu’elle puisse voir « toutes les très grandes personnes. » Il donne à sa femme les quatre cents francs qu’il avait mis de côté pour un fusil afin qu’elle puisse acheter une robe, et passe plusieurs heures tôt le matin à chercher dans les rues le collier perdu même s’il doit aller travailler ce jour-là. Cherchant à protéger l’honneur de sa femme, il suggère qu’ils disent à Madame Forestier que le collier est en train d’être réparé plutôt qu’il a été perdu.

Thèmes

Apparences et réalité

Dans son poème « Ode sur une urne grecque », John Keats a déclaré que « la beauté est la vérité, la beauté de la vérité. » Si les générations suivantes ont apprécié cette affirmation romantique, l’histoire de Maupassant montre bien qu’elle n’est pas toujours correcte. Madame Loisel est belle, mais elle n’est pas contente. Elle a l’apparence de la beauté mais pas la réalité (ou la vérité) de la beauté. Elle est jolie et charmante, mais elle est également mécontente de son sort dans la vie et croit qu’elle mérite plus. Vivant modestement avec son mari avant le bal, Madame Loisel croit subir une terrible injustice en ayant peu de luxe. En fait, elle ne vit pas la réalité de la pauvreté jusqu’à ce qu’elle et son mari s’endettent pour rembourser le collier. Le collier lui-même représente le thème des apparences contre la réalité. Bien que suffisamment beau pour que Madame Loisel se sente à l’aise lors du bal ministériel, le collier n’est en fait rien de plus que de la pâte et du doré. Ainsi, ce n’est pas la réalité de la richesse ou de la haute classe sociale qui importe pour Madame Loisel, juste l’apparence de celle-ci.

Conflit de classe

Le thème du conflit de classe est étroitement lié à celui de l’apparence et de la réalité. Les Loisel sont des membres de la basse bourgeoisie, une classe qui se situe au-dessus des commerçants et des ouvriers (et au-dessus de la famille d’artisans de Madame Loisel) mais nettement en dessous de la classe qui a la main dans la gestion des choses. Les rêves de  » délicatesse et de luxe  » de Madame Loisel sont hors de sa portée sociale. Elle n’a qu’une seule occasion d’assister à un bal, mais pour les dignitaires et les sous-secrétaires d’État qu’elle y rencontre, de telles occasions sont monnaie courante. Elle veut désespérément faire partie de ce monde et se souvient affectueusement de l’affaire depuis de nombreuses années. Son amie d’enfance, la bourgeoise Madame Forestier, est la cible de l’envie de Madame Loisel avant le bal, et la cible de son blâme après alors qu’elle descend dans la pauvreté pour rembourser le collier. L’accent mis par Madame Loisel sur l’escalade sociale est indigne et en opposition avec sa beauté extérieure. Sa conviction que les belles choses et le luxe sont essentiels à son bonheur est l’erreur qui mars sa beauté physique. Monsieur Loisel ne souffre pas de la même obsession du conflit de classe que sa femme. Il se rend compte que sa femme aimerait aller à un bal, et il pense que lui présenter l’invitation la rendra heureuse. Il est surpris d’apprendre qu’elle ne sera heureuse que si elle peut donner l’illusion au bal qu’elle appartient à la classe supérieure.

Générosité et cupidité

Bien qu’elle n’ait pas beaucoup d’argent, Madame Loisel peut être à juste titre qualifiée de gourmande. Sa vie est assez confortable pour se permettre un serviteur, mais elle en souhaite plusieurs. Elle a beaucoup de nourriture, mais elle rêve de « repas délicats. »Son mari peut à peine se permettre de lui acheter une robe de bal, mais elle insiste pour avoir des bijoux pour l’accompagner. Quand elle voit pour la première fois le collier de diamants de son amie, « son cœur convoite. » Sa cupidité contraste nettement avec la générosité de son mari et de Madame Forestier. Monsieur Loisel renonce à la fois à l’achat d’une arme et prévoit des vacances de tir avec des amis pour que sa femme puisse avoir une robe appropriée. Plus tard, lorsque sa femme découvre qu’elle a perdu le collier, il passe volontairement plusieurs heures tardives à récurer les rues même s’il doit se rendre au travail le matin même. De même, Madame Forestier n’hésite pas à offrir à son vieil ami l’usage de l’un de ses bijoux, répondant aux adaptations médiatiques de Madame Loisel

  • Il existe au moins trois versions cinématographiques de l’histoire de Maupassant disponibles en anglais. Le premier, un film muet de 1909, a été réalisé par D. W. Griffith et dure onze minutes. Une version de 1980 dure vingt minutes et est distribuée par Britannica Films. Une production de 1981 dure vingt-deux minutes et est distribuée par Barr Entertainment.
  • Une autre version cinématographique de « The Necklace « , qui suivait le titre français de « La parure », est apparue à la télévision américaine le 21 janvier 1949. La célèbre conclusion a été changée en une fin heureuse, ce qui était apparemment plus au goût de l’annonceur producteur.
  • En outre, il existe plusieurs enregistrements audio de « The Necklace », les plus disponibles sur cassette et sur disque compact : Les Histoires les plus connues de Maupassant (deux volumes), distribuées par Cassettes Works ; Les Nouvelles De De Maupassant (un volume), distribuées par Listening Library ; Les Histoires préférées de Guy de Maupassant (deux volumes), distribuées par Jimcin Recordings ; et les  » La parure « , « Deux amix », « Le baptême » (un volume, abrégé), distribué par Olivia & Salle.

supplication de la laisser porter le collier avec un simple « Oui, bien sûr. » Bien que le collier soit en imitation de diamants, il vaut tout de même cinq cents francs — plus que la robe de Madame Loisel.

Style

Narration et Point de vue

Comme la plupart des nouvelles de Maupassant, « Le Collier  » est raconté par un narrateur omniscient à la troisième personne, qui s’abstient de juger les personnages ou leurs actions. Le narrateur a accès aux

Sujets à approfondir

  • Recherchez le développement de la Troisième République française et examinez comment la société décrite dans ce récit reflète les aspirations et les appréhensions de la nation française dans les années 1880.
  • Explorez les cercles littéraires dont Maupassant faisait partie et expliquez comment leurs théories sur le rôle de la littérature dans la société ont influencé le développement de la fiction française, européenne et occidentale.
  • Lisez plusieurs versions de la fable de Cendrillon et comparez-les avec cette histoire.
  • Comparez cette traduction et d’autres de l’histoire avec l’original français et tenez compte des différences entre les versions anglaises.

pensées des personnages, et mentionne que Madame Loisel est malheureuse parce qu’elle sent qu’elle s’est mariée en dessous d’elle. Mais pour la plupart, le narrateur décrit simplement les événements de l’histoire, laissant au lecteur le soin de déterminer la nature des personnages à travers leurs actions. Surtout, le narrateur s’intéresse à Madame Loisel. Bien que la majeure partie de l’histoire concerne les événements entourant le bal, la narratrice raconte sa naissance dans une famille humble, son mariage, et aussi les nombreuses années de pauvreté qu’ils subissent par la suite à la suite de la perte du collier. Cette narration habile permet à Maupassant de raconter une histoire qui s’étire sur plusieurs années en l’espace de quelques pages seulement.

Symbolisme

Le collier est le symbole central de l’histoire. Madame Loisel « n’avait pas de vêtements, pas de bijoux, rien », et alors que son mari peut lui acheter une robe, ils ne peuvent pas se payer de bijoux. Le collier représente ainsi l’avidité de Madame Loisel et aussi son artificialité. Elle se juge par les choses qu’elle a, et croit que les autres le feront aussi. Le collier de diamants artificiels symbolise le manque de sincérité de son caractère. Ceux qui n’admirent le collier que pour sa valeur supposée ont été dupés. Ce n’est pas parce qu’il a l’air réel qu’il est réel. Ce symbolisme peut être étendu à Madame Loisel: ce n’est pas parce qu’elle ressemble à une dame de la classe supérieure avec sa robe de bal et ses bijoux qu’elle en est une. On peut également dire que les hommes au bal qui l’admirent et succombent à ses charmes et à son intelligence apprécient l’apparence plutôt que la réalité, puisqu’ils ont été séduits par une femme dont les charmes ont été mis en évidence par de tels moyens artificiels.

Fable

De nombreux critiques ont lu « Le Collier » comme un conte de Cendrillon à l’envers. Comme Cendrillon, Madame Loisel mène une vie humble de corvée (du moins le croit—elle) et ne peut assister au bal tant qu’une figure de marraine féerique — Madame Forestier – ne lui fournit pas un collier éblouissant qui fera d’elle l’une des plus belles femmes du bal. Alors que Madame Loisel quitte le bal, l’illusion de son raffinement commence à s’effriter. De même que la robe de Cendrillon se transforme en robe de servante, Madame Loisel doit revêtir de  » modestes vêtements de tous les jours  » pour se protéger du froid de l’air nocturne. Honteuse, elle « descend rapidement l’escalier », perdant probablement le collier alors — tout comme Cendrillon perd sa chaussure de verre alors qu’elle se dépêche de battre le coup de minuit. Le wagon qui ramène les Loisels à la maison est vieux et minable, plus comme une citrouille qu’une grande voiture. Alors que Cendrillon finit par gagner son prince et accède ainsi à la société d’élite, la fortune de Madame Loisel progresse dans la direction opposée de « heureusement pour toujours. »Dans Cendrillon, la vérité et la beauté vont de pair, mais dans « Le Collier », Madame Loisel n’est pas véridique envers Madame Forestier sur le sort du collier, et elle perd sa beauté pendant les années de travaux forcés qu’elle subit du fait de son manque de sincérité et de sa cupidité.

Ironie

Préoccupé par la disparité entre l’apparence et la réalité, « Le Collier » traite des questions découlant de situations ironiques. Dans une société qui valorise tant l’apparence, il est ironique que la belle Madame Loisel soit exclue de la société à cause de sa position de classe. La plus grande ironie de l’histoire, cependant, est incarnée dans le collier lui-même; bien qu’il semble être un bijou de grande valeur, il s’agit en réalité d’une imitation. Les Loisel sacrifient leur humble mais suffisante maison pour acheter un remplacement coûteux pour un original bon marché. Le lecteur peut également découvrir l’ironie dans le nom du personnage principal. « Madame Loisel » ressemble beaucoup à « mademoiselle », le terme français désignant une jeune fille célibataire, ce que Mathilde souhaite qu’elle puisse être.

Hamartia

Dans les histoires tragiques, hamartia est une erreur d’action ou de jugement qui fait que le protagoniste subit un renversement de fortune. Dans  » Le Collier « , ce n’est pas lorsque Madame Loisel emprunte les bijoux de son amie, mais lorsqu’elle ne dit pas à Madame Forestier la vérité sur ce qui lui est arrivé. Parce qu’elle ne dit pas la vérité, Madame Loisel n’apprend pas que le collier est un faux. Elle et son mari sont forcés de vivre dans la pauvreté en raison directe de leur malhonnêteté.

Contexte historique

La Troisième République

Après la guerre franco-prussienne de 1870-71 et l’expulsion de Napoléon III comme empereur, les restes du gouvernement français se sont rétablis en république. La paix avec les Allemands avait été chèrement achetée ; les Français payaient une indemnité de cinq milliards de francs et cédaient des terres précieuses le long de la frontière orientale. Alors que la victoire prussienne a aidé à établir l’État allemand moderne, la France a été rétrogradée à un rôle quelque peu secondaire dans les affaires européennes. La guerre civile a éclaté à Paris entre républicains et monarchistes, menaçant de déchirer l’État français, mais un règlement pacifique a finalement été trouvé. En 1879, avec la démission de son président monarchiste, la Troisième République était devenue le gouvernement fermement établi et les Français commençaient à regarder au-delà de leurs problèmes intérieurs. Au cours des années 1880, la France se réinstalle comme force principale dans l’arène géopolitique, établissant des protectorats en Chine et en Asie du Sud-Est et réaffirmant son contrôle sur des régions d’Afrique. L’humeur des Français après leur défaite face aux Prussiens en 1871 était sombre, mais une décennie plus tard, la nation était dynamique, même si certains conflits entre factions subsistaient encore.

Le Ministère de l’Éducation

Alors que la plupart des traductions en anglais de « The Necklace » déclarent que Monsieur Loisel est un fonctionnaire du ministre de l’Éducation, techniquement ce n’est pas vrai. Le terme français est en fait  » ministre de l’instruction publique  » ou Ministre de l’Instruction publique. Au début des années 1880, la relation entre la religion et l’éducation fait l’objet de nombreux débats. La France, majoritairement catholique, dépend depuis des générations de l’enseignement paroissial, en particulier au niveau de l’école primaire. Au fur et à mesure que les républicains prenaient le pouvoir, les lois régissant la séparation de l’Église et de l’État étaient plus activement appliquées. Congrégations non autorisées

Comparer & Contraste

  • années 1880: Au cours des années 1880, alors qu’un gouvernement républicain se solidifie après la guerre franco-prussienne de 1870-71, la France entre dans une période d’expansionnisme. En partie, leur attitude impérialiste était alimentée par le désir de restaurer la fierté nationale blessée pendant la guerre. Pendant ce temps, une vision déformée du darwinisme social s’est emparée de nombreux Européens, leur insufflant la conviction qu’ils étaient naturellement supérieurs aux races « inférieures » et devaient donc régner sur eux.
    1998: Le président français Jacques Chirac et son Premier ministre Alain Juppé sont soucieux de réduire les dépenses publiques et de baisser les impôts. En 1995, Chirac a remporté l’élection présidentielle en partie grâce à sa promesse de remédier à la disparité entre les riches et les pauvres dans son pays, mais en deux ans, l’agitation ouvrière croissante témoigne de l’insatisfaction de la population à l’égard de sa politique.
  • années 1880: Loisel tente de payer le collier perdu de diverses manières. Il emprunte de l’argent à des usuriers et contracte d’énormes dettes dans le processus. L’usure est la pratique consistant à facturer plus que le taux d’intérêt légal pour prêter de l’argent. Depuis le XVIe siècle, la pratique de l’usure fait l’objet d’un débat éthique, mais c’est une pratique courante en Europe.
    années 1990: Les emprunteurs sont protégés contre les taux usuraires aux États-Unis par diverses lois étatiques et fédérales. Néanmoins, la dette par carte de crédit atteint des records, car de nombreux consommateurs achètent à crédit et paient des taux d’intérêt élevés pour ce privilège. Les soldes élevés des cartes de crédit maintiennent des millions de dettes pendant des années.

il était interdit à des gations telles que les jésuites d’offrir un enseignement, ce qui créait une discorde considérable. L’enseignement élémentaire gratuit et non religieux a été établi par la loi et est devenu obligatoire en 1881. Il est à noter que, comme Monsieur Loisel, Maupassant fut commis au ministère de l’Éducation de 1878 à 1880.

Mouvements littéraires

Pendant la seconde moitié du XIXe siècle, la fiction française était dominée par deux mouvements littéraires : le réalisme et le naturalisme. Avant 1850, les romans français – y compris ceux écrits par des auteurs célèbres tels que Victor Hugo, Honoré de Balzac et Alexandre Dumas — avaient été très imaginatifs et romantiques, remplis de protagonistes admirables, de conflits terribles et de scènes passionnantes. Après le soulèvement de 1848, cependant, une nouvelle génération d’écrivains français dirigée par Gustave Flaubert promeut activement une approche différente de la fiction qui met l’accent sur la représentation réaliste de la condition humaine plutôt que sur des récits romancés de héros et de méchants. Ces réalistes furent bientôt rejoints par les naturalistes, un groupe d’écrivains, dont Emile Zola était le plus en vue, qui dépeignaient la civilisation comme un mince vernis qui séparait à peine l’être humain de son instinct naturel (et parfois animal). C’est dans cet environnement littéraire que Maupassant a commencé sa carrière d’écrivain. Plusieurs de ses histoires, dont « The Necklace », démontrent son affinité avec les mouvements réalistes et naturalistes. Suivant le principe réaliste, ses personnages ne sont pas des types mais des individus dont les motivations sont compréhensibles sinon toujours agréables. Dans la veine naturaliste, les récits de Maupassant sont souvent attentifs aux défaillances de la société, démontrant que les instincts inhérents à l’homme ne sont pas toujours conformes aux valeurs sociales.

Aperçu critique

Au moment où « Le Collier » a été publié pour la première fois, Maupassant avait déjà établi sa réputation comme l’un des plus grands auteurs de nouvelles français. Boule de suif, parue en 1880 dans un recueil d’histoires de plusieurs auteurs, fait de lui un membre instantané de l’élite littéraire. « Le Collier », cependant, était considérablement différent des histoires précédentes de Maupassant; sa fin de tour a surpris beaucoup de ses lecteurs qui n’étaient pas habitués à un tel renversement de sens à la fin d’une histoire. D’autres lecteurs de Maupassant pensaient que le format des nouvelles était en dessous de lui, et ils auraient préféré qu’il écrive des romans à la place.

Les lecteurs américains de l’époque étaient cependant fascinés par l’auteur. La première traduction anglaise des histoires de Maupassant, un recueil de 1888 intitulé The Odd Number car il contenait treize contes, comprenait « The Necklace. Dans l’introduction du livre, Henry James, un éminent écrivain américain et défenseur du réalisme littéraire, a salué les histoires comme « merveilleusement concises et directes. »D’autres critiques étaient tout aussi enthousiastes, comparant Maupassant favorablement à des auteurs de nouvelles américains tels que Bret Harte et Sarah Orne Jewett.

Certains critiques, cependant, doutaient que la popularité de Maupassant durerait. Dans un essai pour l’édition du 16 janvier 1892 de l’Illustrated London News, le romancier et critique irlandais George Moore insistait sur le fait que Maupassant serait oublié au milieu du XXe siècle. Au contraire, sa popularité dans le monde anglophone n’a jamais faibli, en grande partie à cause de l’anthologisation fréquente de « The Necklace. » Dans une enquête menée en 1939 auprès de soixante-quatorze auteurs par la revue Books Abroad, Maupassant était à égalité avec Homer et Walt Whitman pour la sixième place parmi les écrivains les plus influents de tous les temps.

La popularité continue de « The Necklace » aux États-Unis, cependant, a finalement abouti à une vision biaisée de l’écriture de Maupassant. Parce que, comme certains critiques l’avaient prédit, beaucoup de ses œuvres n’étaient plus connues, il est devenu associé à la fin surprise, même s’il ne l’utilisait pas souvent. Bien que les critiques consacrés au genre de la nouvelle continuent de louer Maupassant pour sa maîtrise du style et de l’intrigue, ceux dont l’expérience des œuvres de Maupassant se limite à « The Necklace » commencent à le rejeter comme un filou littéraire. En effet, malgré un regain d’attention entre la Première et la Seconde Guerre mondiale, la réputation de Maupassant a considérablement diminué dans les années 1950 et 1960, et son nom a rarement été mentionné en dehors des références passagères dans les textes consacrés à la critique de la nouvelle ou de la fiction réaliste.

L’intérêt pour Maupassant a été renouvelé en 1969 à la suite d’une publication spéciale de la revue Europe consacrée à des analyses critiques de ses œuvres. Une foule de livres, essais, et articles ont suivi, mais peu ont accordé une attention significative à « Le collier. »En effet, depuis 1980, seuls deux articles sont parus qui ont porté principalement sur « Le collier » — un essai de Gerald Prince de 1982 qui examinait la relation entre les personnages et leurs noms, et un article de Mary Donaldson-Evans de 1985 qui comparait l’histoire avec le conte de Maupassant de 1883 « Les bijoux. »

Pour une histoire qui continue d’être souvent incluse dans des anthologies modernes, « Le Collier » a reçu peu d’attention au cours des dernières décennies, peut-être parce que, comme l’écrivait Edward Sullivan dans sa présentation Maupassant et la nouvelle en 1974, il est « trop accessible au grand public. »Au lieu de cela, les critiques modernes ont tendance à accorder plus d’attention aux œuvres de Maupassant qui ont été transmises de son vivant, en particulier ses romans. Ainsi, une étrange permutation des priorités s’est produite dans la critique de Maupassant; les textes qui ont fait sa réputation, à l’exception de quelques histoires choisies, sont aujourd’hui largement ignorés tandis que ceux qui ont été négligés par ses contemporains sont au centre des discussions critiques modernes.

Critique

Jason Pierce

Pierce est candidat au doctorat à l’Université de Caroline du Sud. Dans l’essai suivant, il commente la fin surprise de « The Necklace » et sa corrélation avec le genre mystère.

Les discussions sur « Le Collier » commencent presque invariablement par sa fin célèbre (ou, selon certains récits, infâme). Une grande partie, sinon la majeure partie, de la réputation moderne de Maupassant dans les pays anglophones repose sur la révélation de Madame Forestier que le collier original emprunté par Madame Loisel était en fait un faux. Parce que « The Necklace » a été si souvent anthologisé et que si peu d’autres œuvres de l’auteur ont été traduites en anglais, la fin surprise est souvent ce que le lecteur moderne associe à Maupassant. Il est important de comprendre, cependant, que la fin du tour n’était pas généralement associée à Maupassant de son vivant, et que Maupassant n’en était pas non plus à l’origine. En fait, la fin surprise existait pour certains

Que dois-je lire ensuite?

  • L’autre nouvelle qui rivalise avec  » Le Collier  » pour le titre de  » chef-d’œuvre de Maupassant  » est sa première histoire publiée,  » Boule de suif’ (1880). Basé sur les expériences de Maupassant en tant que soldat pendant la guerre franco-prussienne, l’histoire dépeint les ravages de la guerre sur la société et illustre l’hypocrisie du patriotisme.
  • Une autre des histoires de Maupassant, « Les Bijoux  » ( » Les bijoux « , 1883), propose une intrigue inverse de celle de « Le Collier « , avec un personnage découvrant que les bijoux supposés d’imitation de sa femme décédée sont en fait réels.
  • Le romancier et critique américain Henry James, qui considérait l’histoire de Maupassant comme une « petite perfection », a écrit une nouvelle intitulée « Paste » basée sur « The Necklace. »Son intrigue est remarquablement similaire à celle de « The Jewels. »
  • Madame Bovary, roman de Gustave Flaubert paru en 1857, condamné à l’origine comme obscène, est aujourd’hui reconnu comme l’un des romans classiques de la littérature française du XIXe siècle. Non seulement était le mentor de Flaubert Maupassant, mais il existe également des parallèles intéressants entre le personnage-titre du roman et Madame Loisel.
  • Maupassant: Un Lion sur le Chemin de Francis Steegmuller, publié en 1949, présente un bon aperçu de la vie de Maupassant, de sa carrière d’écrivain et de sa relation avec Flaubert.
  • Pour un autre exemple de la fin surprise par l’un des contemporains de Maupassant, lisez « Le Don des Mages » de O. Henry. Il a été recueilli dans son livre de 1906 The Four Million et a été réimprimé plusieurs fois depuis.
  • Dans son poème de 1819 « Ode sur une urne grecque », John Keats a examiné la relation entre la vérité et la beauté. Sa conclusion contraste nettement avec celle de Maupassant.

temps, mais pas nécessairement sous la forme utilisée par Maupassant.

Au milieu et à la fin du XIXe siècle, au cours desquels Maupassant écrivait, l’histoire mystérieuse gagnait en popularité en tant que genre à part entière. Auparavant, les « procédures » policières et les vraies histoires de crime — ces dernières étant réputées mais pas toujours basées de manière fiable sur des événements réels — étaient populaires, mais le suspense jouait rarement un rôle dans ces histoires. Grâce aux innovations d’auteurs notables tels qu’Edgar Allan Poe et Arthur Conan Doyle, le genre du mystère a commencé à émerger. Au cœur se trouvait la fin surprise; la solution, la clé qui a débloqué le puzzle de l’histoire, était réservée à la fin. Sans elle, l’histoire mystérieuse n’aurait été qu’une autre procédure, suivant les actions des personnages jusqu’à leur conclusion inévitable et prévisible. Pour donner du suspense à leurs histoires, les écrivains ont tardé à révéler tous les « faits de l’affaire » pertinents, en conservant certaines informations importantes pour la fin. Même aujourd’hui, les histoires mystérieuses sont très rarement de véritables « whodunits » que le lecteur peut résoudre; au lieu de cela, le récit est tissé autour de certaines lacunes qui ne sont comblées que lorsque le véritable coupable est révélé. L’écrivain taquine le public en mélangeant des informations utiles avec suffisamment de « harengs rouges » pour rendre la résolution du mystère presque impossible. Après tout, c’est le rôle du détective de résoudre le mystère; si le lecteur résolvait le mystère, la tentative de l’histoire de créer une tension serait un échec.

Dans cet esprit, il est possible de lire « Le collier » comme une sorte d’histoire mystérieuse sans les pièges traditionnels des détectives, des criminels et des crimes. Le mystère ici concerne ce qui arrivera à Madame Loisel. D’emblée, ce sont ses désirs – un manque de prestige, de station, de richesse, d’objets matériels — qui donnent au récit sa tension et son suspense. Madame Loisel est définie par ce qui lui manque et ce qu’elle n’est pas, plutôt que par ce qu’elle a et est. Elle n’est pas un personnage complet, mais Maupassant n’avait pas l’intention qu’elle en soit une. Au lieu de cela, elle est un type — une figure dont la motivation est de combler les lacunes de son propre personnage, de la même manière que le détective comble les lacunes du récit mystérieux.

Dans « Le Collier », le mystère entre en jeu lorsque les lacunes du personnage principal sont temporairement comblées par le bal, la robe et, surtout, les bijoux de Madame Forestier. Bien que l’événement et la robe soient des conditions préalables au bonheur de Madame Loisel, elle est « tout à fait misérable » et envisage sérieusement de ne pas aller au Ministère parce qu’elle manque de bijoux et d’apparence d’élégance et de richesse. Ce n’est donc pas les atours accumulés qui apaisent le sentiment d’insuffisance de Madame Loisel mais plutôt le collier en particulier. Alors qu’avant elle était remplie de  » chagrin, de regret, de désespoir et de misère », avec les bijoux de Madame Forestier autour du cou, Madame Loisel est  » élégante, gracieuse, souriante, et tout au-dessus d’elle-même de bonheur. » C’est le collier qui transforme Madame Loisel en un tel succès. Sa possession du collier, cependant, est temporaire — contrairement à sa robe ou à ses souvenirs du bal, elle ne peut pas s’y accrocher — et de là naît le mystère de l’histoire. Que se passera-t-il, demande le lecteur, lorsque Madame Loisel devra rendre le collier ? Comment son retour l’affectera-t-il? Quel genre de personne sera-t-elle quand elle n’aura plus le collier pour faire son contenu?

Avant de pouvoir répondre à ces questions, « Le collier » subit une torsion de l’intrigue — un élément commun dans le genre du mystère. Les bijoux de Madame Forestier sont en quelque sorte perdus entre le Ministère et la maison des Loisels, ce qui pousse Monsieur Loisel à fouiller les rues de Paris à leur recherche, un peu comme un détective de Scotland Yard pourrait retrouver un criminel dans les ruelles de Londres. Face à l’embarras de dire à Madame Forestier que ses bijoux ont été perdus, Madame Loisel est persuadée par son mari de mentir à son vieil ami — de lui dire que le fermoir a été cassé et est en train d’être réparé pour qu’ils aient le temps de chercher le collier. Quand ils abandonnent finalement leurs recherches, Madame Loisel déclare qu’ils doivent  » voir à remplacer les diamants. »Avec cela, il semblerait que le mystère ait été résolu. L’introduction du collier dans la vie de Madame Loisel l’a temporairement contentée, mais surtout, elle a produit en elle la tendance à mentir, même à l’un de ses plus anciens amis. L’incident a révélé qu’elle n’avait pas la fibre morale pour admettre la vérité sur les bijoux de Madame Forestier. À la suite de ce trébuchement éthique, les Loisel doivent apprendre à faire face aux difficultés et à la vraie pauvreté à un degré qu’ils n’avaient jamais

« Madame Loisel est définie par ce qui lui manque et ce qu’elle n’est pas, plutôt que par ce qu’elle a et est. »

connu auparavant. L’ancienne belle Madame Loisel devient  » comme toutes les autres femmes fortes, dures, grossières des ménages pauvres. »C’est l’effet de la perte du collier. Avec elle, elle est un grand succès, littéralement la « belle du bal »; sans elle, elle est une femme creuse, dépourvue de morale et accablée par la pauvreté.

Le mystère étant apparemment résolu, le lecteur pourrait penser que l’histoire devrait se terminer à ce stade. En effet, plusieurs critiques ont fait valoir que sa conclusion surprise n’était pas nécessaire. Dans son livre de 1974 The Short Story, Sean O’Faolain a fait valoir que « les vrais mérites du conte tel qu’il est lu ne résident pas dans l’intelligence de cette fin. »O’Faolain croit que le génie de Maupassant réside dans sa caractérisation des Loisels et dans sa représentation des difficultés qu’ils rencontrent. Il est partiellement soutenu dans cette position par Francis Steegmuller, l’auteur d’une biographie influente de Maupassant, qui considérait « Le Collier » comme « intrinsèquement inférieur » aux autres œuvres de Maupassant car « imparfait par des improbabilités », ce qui signifiait toutes les coïncidences improbables de l’histoire, en particulier la révélation de la véritable valeur du collier. Malgré le souhait contraire de ces critiques, la fin fait partie intégrante de l’histoire de Maupassant.

Si l’on lit « Le Collier » comme une histoire mystérieuse, alors le vrai truc n’est pas le fait que les diamants sont en réalité de la pâte mais que le mystère dont l’histoire est concernée est lui-même une tromperie. Le lecteur est amené à croire que le conflit central de l’histoire est basé sur la situation sociale de Madame Loisel et son désir de devenir membre d’une classe supérieure. En fait, cependant, ce conflit n’est que la base du véritable conflit de l’histoire — la disparité entre les apparences et la réalité. Au bal du ministère, le succès de Madame Loisel est le résultat direct de son apparence de richesse et de sa position sociale élevée, alors qu’en réalité elle est relativement pauvre. Et pourtant, la clé de son succès, le symbole de sa prospérité sociale, n’est pas en soi ce qu’elle semble être. Où – comme le lecteur pense que le mystère est de savoir comment le collier affectera le personnage de Madame Loisel, en vérité, le mystère se concentre sur la façon dont les symboles de richesse et de pouvoir affectent l’interaction sociale. L’histoire de Maupassant est moins le récit de l’ascension et de la chute de Madame Loisel qu’un travail de commentaire social. Le lecteur ne reconnaît pas son rôle de « détective » avant la dernière ligne de l’histoire, à laquelle le but de Maupassant est mis à nu. Les effets sur Madame Loisel des bijoux de Madame Forestier et de ses expériences au bal ne sont pas pertinents ; elle n’est guère plus qu’un outil pour le commentaire de Maupassant sur la superficialité de la société parisienne des années 1880.

La fin de l’histoire était nécessaire pour que Maupassant atteigne son but. Ayant acquis la réputation d’être le plus grand nouvelliste de France, il aurait difficilement pu passer au commentaire social non fictionnel et espérer toucher un public aussi grand que celui qu’il a recueilli avec sa fiction. Pour que son message soit reçu par le plus grand nombre possible de lecteurs, il fallait l’intégrer dans une nouvelle, le genre auquel il était le plus étroitement associé. L’histoire devait avoir des personnages crédibles, des situations réalistes (qu’elle en ait ou non, c’est une question de débat critique) et une intrigue forte afin de dissimuler sa véritable mission. La fin devait être une surprise car c’est là que Maupassant a choisi d’insérer son commentaire social. Si cette critique de la société française et sa préférence pour l’apparence plutôt que pour le fond avaient émergé plus tôt dans le texte, l’argument de Maupassant aurait été perdu. Il permet aux lecteurs de se laisser prendre par les apparences avant de révéler la réalité de la situation. Cette tactique permet au lecteur ainsi qu’à Madame Loisel de ressentir tout le poids de l’intrigue. En gardant sa révélation pour la fin, Maupassant est capable de choquer ses lecteurs, tout aussi pris dans les apparences que Madame Loisel, et de révéler le véritable but de l’histoire en tant que critique sociale.

Source: Jason Pierce, « Overview of ‘The Necklace' », pour les nouvelles pour les étudiants, Gale, 1998.

Robert Penn Warren et Cleanth Brooks

Dans l’extrait suivant, les critiques examinent le traitement du temps de Maupassant dans « Le Collier « , dans lequel il alterne entre action dramatique et résumé narratif.

nous donne une bonne chance de considérer le problème du traitement du temps dans la fiction. L’histoire emmène Madame Loisel de la jeunesse au moyen âge. Son enfance est passée en une phrase du premier paragraphe, et les premières années du mariage sont traitées dans les deuxième à cinquième paragraphes. Ensuite, le temps du bal est traité longuement en cinq scènes directes, la conversation sur la robe, la conversation sur les bijoux, la visite à Madame Forestier, le bal lui-même, la recherche du collier perdu. Ensuite, le temps de privation et de paiement, dix ans, occupe une page environ. Puis vient le dénouement, la rencontre avec Madame Forestier dans le parc.

Il y a, on le voit, une sorte d’équilibre entre les longues périodes de temps traitées par synthèse, et les courtes périodes, traitées plus ou moins dramatiquement par rendu direct. En traitant les longues périodes, dans lesquelles l’œil balaie, pour ainsi dire, un panorama, l’écrivain a besoin de frapper sur le fait important, ou le sentiment essentiel de la période. Il doit distiller la chose fondamentale de l’histoire — le personnage de la jeune Madame Loisel, ou la façon dont elle a vécu les dix années de privation. Dans le traitement dramatique – ou scénique – la nécessité, cependant, est de montrer le processus du mouvement à travers le temps impliqué, comment il y a, étape par étape, un développement; comment, par exemple, Madame Loisel décide de parler à sa vieille amie dans le parc, comment elle l’accoste, comment elle découvre la joie inattendue à l’idée que le collier qu’elle avait acheté avait réussi à tromper Madame Forestier, comment Madame Forestier fait la révélation qui, pour nous, portera le poids du sens. La scène, en d’autres termes, donne les « gros plans » du temps, et le résumé donne les « plans longs ». »

Souvent, dans un résumé, un écrivain doit donner plus qu’un simple résumé. Après tout, il écrit de la fiction, et la fiction veut donner le sentiment de la vie, pas seulement les faits nus. Remarquons comment, même dans le résumé relativement dépouillé dans lequel Maupassant présente les années de difficultés, il parvient par quelques touches précises à nous faire sentir la qualité de vie des Loisels. Madame Loisel grattait  » ses ongles roses sur les casseroles graisseuses. »Quand elle transportait l’eau de sa maison tous les matins, elle devait s’arrêter »pour respirer à chaque atterrissage. » Elle était devenue, nous dit Maupassant, forte, dure et rugueuse. Puis il écrit: « Les cheveux froncés, les jupes de travers et les mains rouges, elle parlait fort tout en lavant le sol avec de grands jets d’eau. »Tout s’anime avec la phrase « grands tourbillons d’eau. »Nous voyons cela.

Certaines pièces de fiction, voire certains romans, peuvent se dérouler presque entièrement par scènes, par présentation directe. Par exemple, « De Mortuis » nous donne un seul petit segment de temps, tout comme « Les Filles dans leurs robes d’été », avec seulement un minimum d’exposition résumée du passé. En fait, ces deux histoires, dans le traitement du temps présent, dépendent presque entièrement de la conversation et de l’action directe — plus encore, par exemple, que même « La Loterie », qui occupe également une seule courte section du temps continu.

Cependant, de nombreuses histoires et presque tous les romans doivent osciller entre des traitements plus ou moins directs et un résumé narratif avec plus ou moins de description et d’analyse. Il est bon de commencer à remarquer comment ces deux types de traitement de base (avec les différentes nuances et combinaisons) sont liés. Nous devons nous demander dans quelle mesure le sentiment d’une histoire particulière, la logique de sa narration, l’effet qu’elle a sur nous, sont liés à la gestion par l’écrivain de cette question du temps. Encore une fois, il n’y a pas de règle. Nous devons essayer d’inspecter nos propres réactions aussi soigneusement et candidement que possible, et essayer d’imaginer quel serait l’effet, instance après instance, si une méthode différente était utilisée.

Source: Cleanth Brooks et Robert Penn Warren, « The Necklace », dans Understanding Fiction, deuxième édition, édité par Cleanth Brooks et Robert Penn Warren, 1959, pp. 106-15.

Sean O’Faolain

Dans l’extrait suivant, O’Faolain affirme que l’intelligence de « The Necklace » ne réside pas dans la fin surprise mais dans sa représentation réaliste des relations humaines et de la société.

nous avons une fonctionnaire, avec une jolie petite femme. Ils sont pauvres, comme le sont sans doute parfois les fonctionnaires. Et étant jolie et jeune, elle veut aller à des danses, à des réceptions, et se mélanger avec des gens des Légations, etc., comme le font même les pauvres. Un jour, ils reçoivent une invitation à une fonction importante, une danse — et pour l’occasion, elle veut naturellement être à son meilleur. Elle peut se contenter de sa meilleure robe, mais elle n’a pas de bijoux, et elle craint que sans eux, elle ait l’air aussi pauvre qu’elle l’est. Alors elle emprunte un collier de diamants à un riche ami d’école, et ravie, elle va à la danse et passe un bon moment. Quand tout est fini, elle doit réveiller son mari — qui est allé dormir dans une antichambre, comme le feront les maris — ils sortent, prennent un taxi, et repartent, rentrent chez eux.

Mais quand elle met sa main à sa gorge pour enlever le collier c’est parti ! Elle a perdu ces diamants inestimables. Ils y retournent ; ils cherchent : ils mettent des publicités dans le journal. Tout cela en vain. Elle

 » Remarquez comment, même dans le résumé relativement dépouillé dans lequel Maupassant présente les années de difficultés, il parvient par quelques touches précises à nous faire sentir la qualité de vie des Loisels. »

n’ose pas affronter son riche ami sans eux, alors que fait-elle? Elle se rend chez le meilleur bijoutier de la ville et elle achète, sur le système de versement, un collier identique. Ainsi, cette nuit vraiment heureuse de toute sa vie devient ainsi la dernière nuit heureuse de sa vie; car, maintenant, leur pauvreté est dix fois pire qu’avant: ils sont coulés sous cette charge de dette; et pendant des années et des années, les deux pauvres créatures sont esclaves pour payer ces diamants. Ses jolis looks vont. Ses cheveux se dessèchent. Les rides viennent. Et, puis, après une dizaine d’années de cette misère, elle retrouve son ancienne amie d’école et lorsque son amie compatit avec elle sur son apparence changée, la petite femme autrefois jolie et toujours courageuse dit fièrement: « C’était à cause de toi. »Et elle raconte la triste histoire. Ô, mon cher enfant! » dit son amie, à l’agonie.  » Mais comme c’est inutile! Ces diamants étaient de la pâte. Je les ai achetés pour quelques francs.’

Maintenant, c’est probablement l’exemple le plus célèbre dans la littérature de ce que l’on appelle la « fin du fouet-fissure. »Ceux qui aiment Chekov ne l’aiment pas — c’est si dur et si cruel. Personnellement, je ne l’aime pas particulièrement, mais cela, je m’en rends compte, n’est qu’une question de goût et non de jugement. Mais le point essentiel est que cette histoire serait toujours une excellente histoire, et certains ont même soutenu que ce serait une meilleure histoire, si la chose s’arrêtait avec l’esclavage de la petite femme et s’il n’y avait aucune révélation sur les diamants en pâte, aucune fin de fissure de fouet. Ces critiques soutiennent que la fin de whip-crack est trop artificielle, trop improbable, trop ingénieuse. En tout cas, les vrais mérites du conte tel qu’il est lu ne résident pas dans l’intelligence de cette fin. Le conte a gagné ses lettres de noblesse longtemps, bien avant que nous arrivions à la fin. Il a révélé un segment de la société dans lequel la vie est cruellement comprimée et blessée. Ces deux personnes, l’homme et la femme, sont réelles; leur environnement est réel – réel, peut-être, d’une manière largement typique plutôt que de la manière individualisée qui est la manière de Chekov. Ils évoquent notre pitié. En bref, l’histoire fait son commentaire sur les relations humaines; bien que dans ce cas, la relation soit sociale plutôt que personnelle. Et . . . chaque histoire qui est une histoire le fera inconsciemment.

Source : Sean O’Faolain,  » The Technical Struggle: On Subject « , dans La Nouvelle The Devin-Adair Co., 1951, p. 171 à 92.

Francis Steegmuller

Dans l’extrait suivant, Steegmuller soutient que la fin choc de « The Necklace » est le point culminant de l’histoire, condamnant la représentation de Maupassant des relations comme « vagues et peu convaincantes » et son intrigue comme improbable. Steegmuller affirme également que si Maupassant a la réputation d’être un spécialiste des fins surprises, seules quelques-unes de ses histoires se concluent réellement de cette manière.

Au moment souriant de sa vie où il avait trente-quatre ans, avait construit sa maison à Etretat, embauché François, et commencé à jouir de ses amours plus élégantes, Maupassant a fait quelques-uns de ses meilleurs travaux et de ses travaux les plus connus. Dans ces deux catégories, on peut placer « La Parure » (« Le collier »), l’une des nouvelles les plus célèbres au monde, décrite par Henry James quand elle était nouvelle comme « un peu de perfection. »

Bien que tout le monde connaisse l’intrigue, tout le monde ne connaît pas le RÉSUMÉ de James:

Dans  » La Parure « , une jeune femme pauvre, soumise à un stress  » social « , à la nécessité de faire une apparition à une occasion importante, emprunte à une vieille amie d’école, désormais beaucoup plus riche qu’elle, un collier de perles qu’elle a le malheur effroyable de perdre par quelque malice jamais éclaircie par la suite. Sa vie et sa fierté, ainsi que celle de son mari avec eux, deviennent sujettes, de l’heure du terrible accident, au rachat de cette dette; que, effort par effort, sacrifice par sacrifice, franc par franc, avec des prétextes spécieux, des excuses, une rage d’explication désespérée de leur incapacité à restaurer l’objet manquant, ils finissent par effacer — tous pour constater que toute leur conscience et leur vie ont été convulsées et déformées en vain, que les perles n’étaient qu’une « imitation » hautement astucieuse et que leur pénitence passionnée les a ruinées pour rien.

L’éclat particulier avec lequel « La Parure » est écrite triomphe d’un certain nombre d’improbabilités. (Le manque d’assurance sur le collier, parfois évoqué par les critiques, n’en fait pas partie: l’assurance des bijoux en France n’a commencé à être courante que quelques années plus tard.) Mais même une lecture attentive à mi-chemin du célèbre conte montre que les relations entre les deux femmes et entre l’héroïne et son mari sont vagues et peu convaincantes et que l’achat et la substitution réussie du nouveau collier sont d’une vraisemblance douteuse. Mais le choc de la fin fracassante et écrasante a toujours fait aimer l’histoire à la multitude. L’hommage commun des lecteurs non littéraires de « La Parure » — « Ça n’aurait pas dû être écrit ! Ça te fait trop mal ! » – est formulé comme un reproche; mais en fait c’est l’expression du plaisir le plus intense, la capacité de se faire « sentir mal » par une histoire prisée par la plupart des lecteurs au-delà des rubis.

Maupassant aurait apprécié cet hommage. Car il aimait beaucoup faire en sorte que les gens « se sentent mal » — leur donner, au moins, quelques mauvais moments, les choquer et les surprendre. La perpétration de ce que les Français appellent des farces et nous appelons des blagues était l’une de ses formes d’amusement préférées, et les mémoires de François et des amis de Maupassant sont pleins d’exemples des efforts élaborés auxquels il était prêt à aller pour sécuriser l’inconfort momentané d’une victime. En plus de « Farce Normande », l’histoire des jeux de chevaux de nuit de noces, il en a écrit une autre, « La Farce », qui contient deux blagues pratiques, l’une impliquant le pot de chambre d’une vieille dame, et d’innombrables autres récits sur les victimisations; et dans la vie, il aimait inviter les gens à dîner sous de faux prétextes (feignant de lancer un projet d’investissement, pour meubler une courtisane dans le besoin de sa connaissance avec un riche protecteur sous la forme d’un « marquis espagnol », en fait un ami déguisé, pour présenter à un groupe de dames un charmant collégien qu’ils laissent prendre certaines libertés précoces, sans se rendre compte qu’il est une femme); faire livrer à une dame dans son salon un panier rempli de grenouilles vivantes, faisant ses invités à Chatou, lorsqu’il y a pris un appartement un printemps, manquer le dernier train pour Paris; relâcher les souris sur son bateau parmi les invités; utiliser un langage sale dans l’audition de personnes étouffantes; assurer à des connaissances qu’il avait déjà mangé « une épaule de femme rôtie » et qu’il en avait tellement apprécié qu’il en avait pris une deuxième portion, et ainsi de suite. Cet amour assez infantile pour choquer est une expression douce du sadisme qui trouve encore son exutoire dans ses descriptions fréquentes et généralement artistiquement superflues du sang — comme l’avortement hideux dans « L’Enfant », et, dans ses croquis de voyage, un combat sanguin parmi les poissons méditerranéens et une description de la chair rouge des pastèques. Une fin brutale et choquante comme celle de « La Parure » est une autre expression de la tendance.

Maupassant a une immense réputation de spécialiste des histoires qui se terminent ainsi — des histoires avec des fins « trick » ou « twist ». Considérant à quel point le désir de choquer était profondément ancré dans sa nature, on pourrait s’attendre à ce qu’il ait écrit de nombreuses histoires de ce genre; mais le fait est qu’il ne l’a pas fait. Il est impossible de mentionner un chiffre précis, car entre le choc et le non-choc, il n’y a pas de ligne de démarcation claire, mais parmi les plus de deux cents nouvelles de Maupassant, une poignée seulement ont des fins qui peuvent à juste titre être qualifiées de trick ou de shocking.

La légende selon laquelle il était un spécialiste de ce genre d’histoire n’existait pas de son vivant. Son travail a été analysé à plusieurs reprises et rigoureusement par des critiques contemporains tels que Jules Lemaitre et Anatole France, des hommes qui, malgré les différences dans leur approche de la littérature par rapport à celle des critiques actuels, étaient extrêmement discriminants et perspicaces; et ils auraient sans pitié souligné l’infériorité esthétique – le plaisir drastiquement diminué de relire — inhérente à un grand nombre d’histoires de Maupassant aux fins de truc, si un tel corps avait existé. Les critiques actuels qui font l’accusation révèlent qu’ils répètent ce qu’ils ont entendu ou lu, qu’ils ne connaissent pas bien Maupassant. En effet, l’affirmation selon laquelle le travail de Maupassant est généralement caractérisé par une supercherie peut généralement être considérée comme un avertissement: un avertissement que d’autres inexactitudes planent à proximité. Lorsqu’un critique examinant les cahiers d’Henry James, par exemple, dit: « On voit que l’exemple de Maupassant – plus fréquemment invoqué, je pense, que celui de tout autre écrivain – avec ses intrigues qui dépendent de la pure supercherie, a eu beaucoup plus d’influence sur Henry James qu’on ne l’aurait jamais attendu », il trahit non seulement une mémoire défectueuse de Maupassant, mais aussi une lecture ou une interprétation négligente de l’œuvre en main: l’examen des cahiers de James montre que ce n’est pas la supercherie ou les complots de Maupassant que Henry James continue d’invoquer, mais la capacité enviable de Maupassant à écrire avec brièveté et compacité.

Dans exactement un cas enregistré, la « supercherie » de Maupassant a influencé Henry James et l’a influencé concrètement ; et en cette occasion unique, la supercherie était celle de « La Parure. »L’origine de sa nouvelle « Paste », nous dit James, ne devait consister qu’en l’ingénieuse pensée de transposer

« Même une lecture attentive à mi-chemin du célèbre conte montre que les relations entre les deux femmes et entre l’héroïne et son mari sont vagues et peu convaincantes. »

les termes d’un des admirables contes de Guy de Maupassant —  » La Parure. »

Il semblait inoffensif de simplement retourner cette situation – de déplacer, en d’autres termes, le terrain de l’horrible erreur, en faisant de cela non pas un faux trésor censé être vrai et précieux, mais un vrai trésor censé être faux et creux: bien qu’un nouveau petit « drame », un nouveau décor pour mes perles — et aussi différent que possible des autres — devait bien sûr être trouvé.

Source : Francis Steegmuller, « ‘Le Collier' », dans Maupassant : Un Lion sur le chemin, Random House, 1949, pp. 203-10.

S.E. Bates

Dans l’extrait suivant, Bates discute de la capacité de Maupassant à combiner astuce et tragédie en une seule, affirmant que dans « The Necklace », il est clair que l’auteur était complètement conscient des limites de la fin surprise.

Maupassant. . . reste ce tour de force suprême de fins surprises, « Le Collier », dans lequel l’excellence et la limitation de la méthode sont parfaitement visibles. L’histoire de Maupassant de la femme qui emprunte un collier de diamants à un ami, le perd, en achète un autre pour le remplacer, et est condamnée à dix ans de souffrance et de pauvreté par la tâche de rembourser l’argent, pour finalement faire la terrible découverte que le collier original n’était pas du diamant mais de la pâte — cette histoire, bien qu’elle dépende du choc de la dernière ligne, diffère par un point extrêmement important de tout ce qu’O. Henry a jamais fait. Car ici, dans « Le Collier », le tour et la tragédie ne font qu’un. En mettant une certaine pression sur la crédulité du lecteur (pourquoi, demande-t-on, n’a-t-on pas expliqué en premier lieu que le collier était en pâte? ou pourquoi, plus tard, Madame Loisel n’a-t-elle pas fait un sein propre de tout à une amie qui lui avait tant fait confiance?), par l’habile élimination des probabilités, Maupassant se retrouve en possession d’une carte choquante et surprenante dont le lecteur est totalement ignorant. Il est entièrement ignorant, c’est-à-dire la première fois. Comme un enfant qui est effrayé par le premier boo soudain! au coin de la rue, mais sait tout à ce sujet la prochaine fois, le lecteur de « The Necklace » ne pourra plus jamais être trompé. Car Maupassant est obligé de jouer cette carte, qui n’est la sienne que par un processus de triche, et l’avoir jouée ne pourra plus jamais répéter son effet dévastateur. En story-telling, comme dans les jeux de société, vous ne pouvez jamais espérer tromper la même personne deux fois. Ce n’est que grâce à la définition habile de Maupassant de la tragédie de Madame Loisel que « Le Collier » survit comme une pièce crédible de réalisme. Maupassant, l’artiste, était bien conscient que le truc seul est sa propre limite.

Source: H. E. Bates, « Les écrivains américains après Poe », dans The Modern Short Story: A Critical Survey, The Writer, Inc., 1941, p. 46 à 71.

Douglas Bement

Dans l’extrait suivant, Bement propose une interprétation du développement par Maupassant de l’intrigue de « The Necklace », estimant qu’il a pu considérer les implications de la cupidité et de l’innocence pour former son histoire.

Nous n’avons aucune idée de l’origine de l’idée; elle aurait pu naître de la vue d’un collier en pâte dans une vitrine. L’œil vif du conteur, s’éclairant dessus, aurait pu être arrêté avec le germe d’une idée, sur laquelle son imagination s’est mise à travailler. Supposons qu’une personne achète un collier à un prix fabuleux, croyant qu’il est authentique? Comme l’écrivain a joué avec cette idée, certaines objections ont dû se présenter.  » Qu’en est-il ? » Maupassant aurait bien pu se demander. « Qu’est-ce que cela signifierait? Quelle signification cela a-t-il? Comment est-ce lié à mon expérience, ou à l’expérience de mes camarades? Quel genre de personne serait apte à acheter un collier en pâte, le pensant réel? »

La dernière requête pourrait bien soulever le problème toujours présent de la probabilité. Serait-il probable qu’une personne moyenne achèterait un collier en pâte pour une somme fabuleuse sans enquêter sur sa véritable valeur? Et même s’il était dupé après avoir enquêté, devrions-nous vraiment nous sentir désolé pour lui; attiserait-il nos émotions; ne devrions-nous pas le sentir comme un imbécile? Et si une personne pouvait se permettre d’acheter un bijou aussi cher, devrions-nous ressentir beaucoup sa perte?

Mais supposons qu’il n’ait pas les moyens de l’acheter ? Supposons qu’il l’achète pour gagner la faveur d’une fille? Mais nous ne devrions pas non plus sympathiser avec une fille qui pourrait être ainsi achetée, ni avec un homme qui voulait l’acheter. Pourtant, il pourrait avoir sa version de l’histoire; c’est une possibilité.

Finalement, on peut supposer, Maupassant a eu l’idée qu’une femme emprunte le collier à une autre, en supposant qu’il soit réel. Elle perd le collier et le remplace par un précieux. Si l’emprunteur était riche, toute la procédure serait une blague. Si elle était pauvre, ce serait tragique. Si sa pauvreté était partagée par une autre victime innocente, ce serait encore plus tragique. La victime innocente pourrait être son mari.

Ici, Maupassant aurait bien pu s’arrêter pour faire le point. L’idée est en cours, mais quelles en sont les implications ? Au moyen du collier, toute la cupidité, tout l’amour superficiel des ornements coûteux, tous les efforts de tant de gens pour impressionner les autres par leur apparence sont personnifiés. Ces personnes sont les sépulcres blanchis bibliques, symboliques de l’imposture et des faux-semblants de la société. Voici le trait humain souvent récurrent qui consiste à sembler être ce que l’on n’est pas, le désir de paraître meilleur que l’on ne l’est.

Ici, dans cette réflexion philosophique, entre l’observation de la vie qui fait partie de la chaîne du tissu. Voici le thème qui traduit l’imaginaire en réel,  » qui donne à rien aéré une habitation locale et un nom « , qui fait sortir l’imaginatif de nulle part, l’imprègne de l’esprit de la réalité, et le traduit en termes de vie.

Son mari sera donc la victime innocente, car elle-même, à cause de sa vanité, peut ne pas être innocente à nos yeux. Nous sommes prêts à ce que les coupables souffrent; mais notre émotion est éveillée lorsque nous voyons les innocents payer la peine.

Puis, supposons, vint la question des personnages des principaux de l’histoire. Quel genre de femme voudrait emprunter un collier? Elle doit être vaine, mais même derrière un masque de vanité se cachent des faiblesses humaines avec lesquelles nous pouvons sympathiser. Nous regrettons la femme qui ne serait vaine qu’une seule fois, si tout le fond de sa vie, comme celle de Cendrillon, était une succession de jours gris remplis d’une routine morne sans fin. Peut-être la femme ne voulait-elle qu’une seule aventure au monde; elle ne sera pas irréprochable, mais au moins nous pouvons comprendre.

Alors qu’en est-il du mari? Il doit être pauvre, travailleur; il doit aimer sa femme assez pour lui donner des choses même au-delà de ses moyens; il doit être assez faible pour être dominé.

Et qui est le centre de l’histoire? Sur qui la lumière doit-elle se concentrer ? Qui doit susciter nos émotions les plus profondes? Ce doit être le mari. Ils souffriront tous les deux, mais nous devons être plus douloureux pour lui, la victime innocente, que nous ne le sommes pour elle. . . .

Et nous pourrions donc spéculer sans cesse et de manière beaucoup plus détaillée sur Maupassant et son histoire. Même sans aucune orientation de l’auteur lui-même, la spéculation serait rentable. Nous sommes aidés à voir finalement à travers ses yeux, et bien que, dans certains cas, nous ne nous soucions pas du point de vue, de l’attitude, de l’interprétation ou du matériel de l’auteur, nous pouvons au moins voir le génie à l’œuvre, façonnant à ses fins les matériaux qui nous entourent quotidiennement.

Mais heureusement, il existe des sources à notre disposition pour étudier avec une certaine exactitude la germination des idées d’histoires. Il y a les cahiers de Hawthorne, Tchekhov, Katherine Mansfield, et d’autres, qui racontent les luttes que chacun a eues avec les histoires que nous avons l’habitude de lire comme des réalisations artistiques terminées. Et ici, nous sommes aidés à réaliser que la germination d’une idée d’histoire est un processus long et sournois, qui met en jeu non seulement la capacité de saisir l’idée, mais aussi la faculté de ressentir sa signification et ses implications. . . .

Source: Douglas Bement,  » The Woof-Plot « , dans Weaving the Short Story, Farrar & Rinehart, Inc., 1931, p. 65 à 87.

Sources

James, Henry.  » Guy de Maupassant « , réimprimé dans ses portraits partiels, Macmillan, 1888, pp. 243-87.

Prince, Gerald.  » Nom et destin dans ‘La Parure' », dans La Revue française, Vol. 55, 1982, p. 267 à 71.

Sullivan, Edward D.  » Maupassant et la nouvelle », dans Cahiers de l’association internationale des études françaises, Vol. 27, p. 223 à 36.

Lectures complémentaires

Artinien, Artine. « Introduction » dans Les Nouvelles complètes de Guy de Maupassant, Hanovre House, 1955, pp. ix -xvii.

Une introduction à la réputation littéraire de Maupassant, en particulier aux États-Unis.

Donaldson-Evans, Mary.  » Le dernier rire : Les bijoux et La parure de Maupassant « , in French Forum, vol. 10, 1985, p. 163 à 73.

Compare  » Le Collier  » à  » Les bijoux « , une autre histoire de Maupassant aux thèmes similaires, plaidant pour la supériorité du premier sur sa plus grande complexité.

Europe, n° 482, 1969.

Un recueil d’essais en français sur Maupassant et ses œuvres, qui contribua à rétablir sa réputation littéraire.

James, Henry.  » Guy de Maupassant « , dans Le Numéro impair de Maupassant, Harper & Brothers, 1889, pp. vii -xvii.

Également publiée dans l’édition du 19 octobre 1889 de l’influent périodique Harper’s Weekly, cette pièce a servi d’introduction aux lecteurs américains aux œuvres de Maupassant.

O’Faolain, Sean. La Nouvelle, Devin-Adair, 1974.

Dans une section intitulée  » La Lutte technique: Sur le sujet, « O’Faolain aborde « Le Collier », entre autres œuvres, et soutient que le mérite de l’histoire ne réside pas dans sa « fin fouettée », mais dans la représentation de Maupassant des personnages et de la société.

Steegmuller, Francis. Maupassant : Un Lion sur le chemin, Collins, 1949.

Avant tout une biographie, cet ouvrage relie une grande partie de la fiction de Maupassant à sa vie à travers le dispositif de la psychanalyse.

Sullivan, Edward D. Maupassant : The Short Stories, Barron’s, 1962.

Une introduction aux contes et nouvelles de Maupassant, avec quelques commentaires utiles sur « Le Collier. »

Jean-Pierre, Albert.  » La Génération de 1850 « , dans sa littérature française de 1795 à Notre Époque, Funk & Wagnalls, 1968, pp. 263-359.

Offre un aperçu des grandes figures et mouvements de la littérature française et contextualise les écrits de Maupassant en termes de contributions au développement littéraire et de relations avec d’autres auteurs.

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